Le journaliste Paul Mahel, dans une tribune publiée ce samedi 8 mai 2021 sur sa page Facebook, saisit l’audience accordée hier à Abdelkarim Deby, envoyé spécial du Président du Conseil Militaire de Transition Tchadien au Palais de l’unité, pour analyser la crise politique qui secoue le pays voisin.
Alors que le président de la République du Cameroun a reçu en audience le vendredi 07 mai 2021 Abdelkarim Deby, envoyé spécial du Président du Conseil Militaire de Transition (CMT) Tchadien au Palais de l’unité, l’ancien journaliste de Canal2 international saisit cette actualité pour faire une comparaison avec le cas centrafricain à l’époque où Michel Djotodia avait pris le pouvoir par les armes et que le Chef de l’Etat n’avait pas approuvé jusqu’à ce que ce dernier renonce au pouvoir. Quand sera-t-il du cas tchadien en ce moment ? S’interroge l’ancien porte-parole de d’Akere Muna.
Ci-dessous l’intégralité de sa tribune :
LES TEMPS CHANGENT.
Le Président de la République Paul Biya, a reçu hier en audience Monsieur Abdelkarim Deby, envoyé spécial du Président du Conseil Militaire de Transition (CMT) Tchadien. Ce dernier, en provenance de Brazzaville où il avait rencontré quelques heures plutôt le Président Sassou Nguesso, était porteur d’un pli fermé du patron de la junte Militaire au Tchad à son homologue(?) Camerounais.
En temps normal, la réception d’un tel émissaire est un fait totalement ordinaire, voir même banal dans les relations bilatérales entre deux pays aussi proches et aussi liés que le Cameroun et le Tchad. Sauf que là, nous ne sommes pas en temps normal. Il se trouve qu’après le décès le 20 Avril dernier du Maréchal du Tchad Idriss Deby Itno, son fils, le Général de corps d’armée Mahamat Idriss Deby, a réuni quelques-uns de ses copains militaires et s’est autoproclamé Président du fameux CMT, et de fait, chef de l’Etat.
Pourtant, bon nombre d’analystes et d’observateurs politiques disent du Président Biya (Président de la conférence des chefs d’états de la Cemac), qu’il est quelqu’un de principiel et très attaché au respect de l’ordre constitutionnel, lui-même ayant été victime d’une tentative de coup d’état deux ans seulement après sa prise de pouvoir.
On se Souvient alors d’un certain Michel Djotodia, qui, un soir de Mars 2013, alors à la tête de la rébellion Seleka, s’était autoproclamé chef de l’état en RCA après avoir mis en déroute le Président François Bozizé. Celui-ci (Djotodia) avait littéralement été ostracisé par le Président Biya, malgré les interventions des Présidents Deby et Obiang. Le Président Biya va par exemple interdire à Michel Djotodia de prendre part au sommet sur la sécurité maritime tenu à Yaoundé en Juin 2013. De même il renoncera à la dernière minute à prendre part au sommet extraordinaire des chefs d’Etats de la Cemac, qui se tenait quelques jours plus tard à Libreville, parce que Michel Djotodia s’y était imposé.
Un mois plus tard (le 29 Juillet 2013), sur insistance une nouvelle fois des Présidents Deby et Obiang, Paul Biya consentit à recevoir Le Ministre centrafricain des Transports et de l’aviation civile de l’époque, Arnaud Djoubaye Abazene, qui était porteur d’un pli fermé adressé par Michel Djotodia au mari de Chantal. Rien ne filtra dans la presse après cette rencontre, mais quelques indiscrétions glanées ici et là dans les couloirs du palais d’Etoudi, laissaient entendre que le Président Biya avait sans ambage, fait dire au Président Djotodia de quitter le pouvoir. Ce qui arriva six mois plus tard lorsque Michel Djotodia démissionna le 10 Janvier 2014.
Le Président Biya va-t-il réserver le même sort au chef de la junte Militaire au Tchad, ou alors les principes d’alternance démocratique seront sacrifiés à l’autel des intérêts sécuritaires, au regard de la situation dans le bassin du lac Tchad, dans le Golfe de Guinée et dans la Sahel?